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Covid Interview 4 - RFO, club formateur

Bien sûr, la frustration a envahi les joueurs de l’Ile de Ré comme les autres. Pourtant, les Ré Flying Oysters ont décidé de mettre ce temps suspendu à profit pour se réinventer. La solidarité entre générations pourrait bien être le fondement du Ré nouveau. Rencontre avec le fondateur du club, Raphaël Mathé, et deux joueurs d’équipe de France juniors, son fils, Kaïs Mathé et Salomé Raulet.


Quelle influence le confinement a-t-il eu sur la motivation des licenciés ?


Raphaël Mathé : Au début du premier confinement on avait encore l’espoir de participer aux championnats du monde junior, donc on a continué à faire de la préparation physique chacun de notre côté. Quand ça a été annulé, c’est vrai qu’il y a eu une petite baisse de moral. Mais rapidement on s’est tourné vers le championnat beach avec une grosse motivation de l’ensemble du club et les juniors comme locomotive. Avec le podium comme objectif, on a fait une grosse préparation sur plage en juin/juillet/août, beaucoup d’entraînements avec de larges effectifs. Donc nouveau coup de massue à l’annulation du championnat puis du Rémix (tournoi annuel du club). Mais finalement j’ai trouvé qu’il y avait quand même de l’optimisme puisque les entraînements ont continué tant qu’on a pu et des séances de prépa en commun par visio ont été lancées. Même avec des objectifs très lointains, le manque a généré une envie de continuer.


Salomé Raulet : Quand j’ai su que les championnats du monde étaient annulés, j’ai eu un coup de mou : tu te dis que ça sert plus à rien. Mais finalement on s’est remotivés entre nous en se disant qu’il y aurait forcément quelque chose de positif à la fin.


Quels moyens avez-vous utilisés pour entretenir la motivation pendant les confinements, et pour la relancer lors des déconfinements ?


R. M. : On s’est un peu réinventé en faisant des séances physiques en visio, en travaillant avec des anciens joueurs du club comme Sacha Poitte-Sokolsky qui est pro au Royal de Montréal ou Antoine Liron (Sesquidistus). Ils se sont investis en rendant les séances vraiment intéressantes et en motivant tout le monde. Cela a même recréé un lien entre les générations du club, ça s’est ressenti à la reprise de l’entraînement on a vu revenir des joueurs qui avaient disparu !


Kaïs Mathé : On a créé un groupe Snapchat avec les juniors RFO pour s’envoyer des photos de toutes les prépa qu’on faisait, pour maintenir le lien, se motiver… On a aussi projeté de créer un pick-up avec des joueurs plus anciens du club pour faire des tournois.


Y a-t-il eu un traitement spécial des juniors du club pendant cette crise ? Une préparation différente en fonction de leur âge ?


R.M. : Il n’y a pas eu de changement à ce niveau par rapport aux habitudes du club. À part les U 15 qui ont un entraînement à part on a toujours mélangé les jeunes et les adultes. De toute façon nos jeunes sont bien meilleurs physiquement que les vieux ! On s’est juste adapté à la reprise, comme les joueurs sont en manque on fait très peu de tactique ou de physique mais beaucoup de jeux comme ça chacun va à son rythme et il n’y a pas de frustration. Encore plus que d’habitude, l’objectif est le plaisir avant tout !


Avez-vous modifié la communication avec les parents ? Y-a-t il eu des réticences de leur part à la reprise ?


R.M. : On n’a pas eu de retour, on n’a jamais eu trop de soucis avec les parents. J’ai l’impression qu’il y a une bonne confiance. À ma connaissance dans le club, il n’y a pas de jeune qui ait arrêté l’ultimate à cause des contraintes liées à la crise sanitaire. La reprise a été facilitée par le fait que les équipes UNSS n’ont jamais vraiment arrêté, donc les jeunes continuaient à jouer dans le cadre scolaire. Il n’y a pas eu de grosse coupure pour eux.


Le confinement a-t-il eu une incidence sur la situation économique du club ? Y a-t-il eu des retours ou des réclamations quant aux paiements des licences ?


R.M. : On a pas été trop touchés, le seul problème a été l’absence du Rémix qui est une source de financement, mais surtout un grand moment de fête pour nous. C’est plus moralement qu’on a accusé le coup. Financièrement on est assez suivi par les collectivités, on a donc eu des subventions. Comme on est souvent club organisateur, on fait peu de déplacements donc finalement on a pas perdu d’argent. La politique du club n’étant pas de gagner de l’argent mais plutôt de ne pas en dépenser, on arrive à prendre en charge à cent pour cent tous les déplacements des joueurs. Je pense que les parents en sont conscients et comprennent bien que la licence de 75 € couvre l’ensemble des prestations du club et pas uniquement les compétitions, donc non, pas de réclamation.


S.R : Dans d’autres sports, la licence est très chère. A l’ultimate, ce n’est pas du tout le même budget que l’équitation par exemple, donc ça ne posait aucun souci à mes parents, même avec les annulations. On a quand même eu des entraînements avec des coachs, une prépa, on a encore fait du beach la semaine dernière, ça nous occupe bien !


Le confinement a-t-il une incidence sur la vie non sportive du club ?


R.M. : Là aussi on s’est un peu réinventé, avec les réunions en visio. On a eu la chance de faire l’AG en réel, mais sinon beaucoup de réunions ont eu lieu à distance. On a pu repenser le projet associatif ce qu’on n’aurait pas forcément eu le temps de faire. Des parents de joueurs ont notamment intégré le nouveau bureau. On développe aussi beaucoup de nouvelles activités comme des sessions de disc-golf, une future initiation d’ultimate à la prison, des formations premiers secours… avec l’investissement de tout le club, les anciens mais aussi les jeunes. J’ai été très surpris de voir parfois une quinzaine de jeunes assister à des réunions de trois heures pour parler de l’avenir du club... et pas des visio apéro, des vrais réunions ! La communication est aussi maintenant gérée par les jeunes : les réseaux sociaux, le magasin RFO… C’est eux tout ça.


K.M. : Sur le compte Instagram on a fait beaucoup de choses : des petits quiz sur l’histoire du sport, celle du club, des vidéos sur le championnat, les meilleures actions des équipes... Il y en a aussi qui regardent beaucoup de vidéos et on avait comme projet de faire des séances d’analyses de match.


S.R: On est tous potes, on est très proches. Et comme on ne peut plus aller boire un verre ensemble, on se retrouve tous à l’ultimate. Du coup, l’entrainement c’est l’endroit où on se voit le plus, on ne veut pas le rater et on l’attend avec impatience.


Comment vous projetez-vous sur la suite de l’année par rapport à l’incertitude du calendrier ? (interview réalisée le 12 janvier, juste avant l’annulation de toutes les compétitions)


K.M. : On a un week-end de sélection fin janvier et la coupe régionale mixte qui semblent maintenus. Personnellement je me mets des œillères et je me dis que c’est acquis, comme ça je suis à fond dans la prépa physique et je ne suis pas démotivé.


S..R : On vit quand même dans l’incertitude, on fait comme si on allait avoir les compétitions et si ça se trouve au dernier moment on va nous dire que c’est annulé… On sera dégoûté, mais a pas le choix donc on y croit. Ça fait un an, c’est trop long !


R.M. : C’est vrai qu’ils ne posent aucune question sur les dates, ils ne veulent rien savoir ! On a une vision à court terme on parle de l’organisation du mixte dans 15 jours, des sélections en équipe de France, de l’outdoor en avril mais pas plus loin. Pour le Rémix on a tout le temps, c’est dans huit mois. Et puis de toute façon tout est prêt, on l’était pour fin août donc ça ne change pas et on a eu des retours des joueurs qui attendent ça avec impatience.


Imaginez-vous un changement profond dans notre sport à l’issue de cette crise, va -t-il y avoir « un monde d’après » dans l’ultimate ?


K.M. : Je pense qu’il peut y avoir des grosses surprises, entre les clubs qui se sont mis en sommeil et ceux qui au contraire ont intensifié leur prépa, des grosses équipes peuvent perdre leur place… On va vite voir les différences de motivation pendant le confinement.


S. : Personnellement le jeu et l’ambiance pendant les week-end me manquent tellement que quand on va se retrouver en compétition je pense que ça va être vraiment fort, encore plus qu’avant !


R.M. : Pour beaucoup ça a été une période de réflexion, et je suis persuadé qu’on va voir pas mal de gens lâcher les sports traditionnels notamment indoor, pour se tourner vers des activités comme la nôtre, mixte et essentiellement outdoor. A mon avis on va gagner des licenciés. Et effectivement au niveau national, il peut y avoir une redistribution des cartes avec des générations qui vont laisser la place à d’autre plus brutalement, sans la période de transition qui aurait pu avoir lieu cette année. La reprise va aussi être intense émotionnellement, c’est dans ces moments qu’on se rend compte qu’on fait partie d’une famille à part et qu’on est tous très proches les uns des autres.




Une place centrale pour les juniors


RFO, club formateur au palmarès impressionnant chez les jeunes est né en 2002. Très rapidement, sur la base des enfants des licenciés de l’époque une section jeune a été créée et depuis ils alignent systématiquement des équipes en U13, U15 et U17. Recruter a été facile dans un premier temps car Raph, fondateur et président/ entraineur du club travaillait dans un centre de loisir. Par la suite le collège a pris le relais en créant une section UNSS en 2012. Depuis, grâce aux résultat obtenus relayés par la presse locale depuis 18 ans, le club est réputé dans la région et les parents connaissent l’ultimate.


- SALOMÉ : « Moi, ma sœur en avait fait en UNSS, c’est comme ça que j’ai commencé. Et comme les jeunes du club étaient tous au collège, avec les réseaux sociaux on a vu qu’ils avaient des super résultats forcément ça donne envie. »

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